
Faire l’inventaire des stocks de marchandises ou de matières détenues par votre entreprise, c’est compter les quantités stockées (nombre de pièces, kilos, litres) mais aussi valoriser celles-ci (en monéraire -en euro-), pour être comparé à la valeur du stock apparaissant dans la comptabilité de l’entreprise. L'état d’inventaire constitue un justificatif comptable à réaliser une fois par an en vertu du Code de commerce.
L’analyse des écarts entre les données comptables et le stock effectivement compté permet de corriger des erreurs mais aussi de modifier la valeur des stocks dans les livres pour tenir compte d’incidents d’exploitation (vol, perte, obsolescence, fluctuation du cours des matières).
Vous trouverez dans cette fiche pratique les informations permettant de savoir comment faire un inventaire des stocks.
1. Organisez-vous avant de faire un inventaire des stocks
La responsabilité de l’inventaire des stocks incombe aux dirigeants de l’entreprise.
L’opération peut s'avérer sensible car la valeur des stocks impacte la valeur patrimoniale de la société (le total du bilan comptable), mais aussi son résultat (le bénéfice ou la perte inscrits au compte de résultat). Plus la valeur des stocks est importante, plus les conséquences d’une valorisation erronée sont importantes, d'où l'importance de bien réaliser l’inventaire physique des stocks.
Répertoriez la nature des stocks
Selon leur activité, les entreprises peuvent détenir en stock :
- des marchandises (produits achetés et revendus sans transformation) ;
- des matières premières (matières entrant dans le processus de fabrication d’une activité de transformation) ;
- des produits semi-finis (produits transformés pour entrer dans le cycle de fabrication d’un autre produit) ;
- des encours de production (produits dont le cycle d’élaboration n’est pas terminé au moment du comptage des stocks) ;
- des stocks de fluides (gasoil, gaz).
Tous ces stocks, qui sont la propriété de l’entreprise, ont une valeur précise à l’instant où on les compte.
La valorisation de l’inventaire est l’acte de gestion qui établit cette valeur.
Préparez la procédure de comptage des stocks
La mise en pratique du comptage des stocks dépend de la nature de ceux-ci et de l’activité de l’entreprise.
Exemple : les moyens à mettre en œuvre pour le relevé physique du stock d’or pur détenu par un artisan joaillier sont différents de ceux requis pour estimer un silo de plusieurs tonnes de blé. L'encombrement, le prix par unité de valeur et le degré de précision nécessaire pour faire l'inventaire physique de ces matières imposent des procédures différenciées.
Définissez qui va faire quoi, quand et comment ?
Établissez une procédure qui garantit la qualité de la prise d'inventaire. En pratique, la compétence des préposés et le nombre de ceux-ci dépendent de ce qu’il faut compter.
Le choix du moment de l’inventaire est crucial : il faut figer les stocks pendant les opérations de comptage.
Bon à savoir : certaines entreprises ferment leurs portes pendant l’inventaire. C'est l'idéal car suspendre l’exploitation permet de n'avoir ni entrée ni sortie de stock entre le début et la fin de la prise d'inventaire.
Diffuser un mode d'emploi écrit auprès du personnel et s’assurer pendant les opérations que la procédure est respectée est indispensable pour maximiser les chances d'obtenir un comptage réalisé sans erreurs.
Si votre activité est saisonnière, fixez la date de prise d’inventaire de vos stocks à un moment où les stocks sont bas.
La prise d’inventaire a souvent lieu à la date de la clôture comptable des comptes, mais ce n’est pas une obligation légale. Disposer d'un état d'inventaire établi à une date proche de la clôture comptable renforce cependant le caractère probant du bilan comptable.
2. Procédez au comptage des articles stockés
Une bonne pratique consiste à remettre à chaque opérateur de comptage une liste de références à compter : c’est-à-dire que cette personne devra constater visuellement la quantité physiquement présente devant lui.
Il est préférable que la liste des articles à recenser ne fasse pas référence aux quantités enregistrées dans l’informatique de l’entreprise, afin d’obliger le préposé à compter réellement ce qu’il voit plutôt que de valider le chiffre qui lui est soumis.
Conseil : vous pouvez envisager de faire le comptage par binômes de personnes, voire de faire compter chaque stock successivement par deux personnes différentes, afin de détecter tôt des erreurs manifestes (fatigue, distraction) lors du comptage.
La procédure d’inventaire physique doit aussi sensibiliser les personnes qui comptent les unités en stock à relever d’éventuels défauts sur les stocks : si des produits présents en stock ont perdu tout ou partie de leur valeur marchande, il faut en tenir compte.
Exemple : en comptant le stock, vous remarquez que des produits ont été souillés, leur emballage abîmé ou que la date de péremption est proche. La responsabilité du gestionnaire est de corriger la valeur de son stock en fonction du potentiel commercial que celui-ci représente.
De même, si votre entreprise a en stock des produits non vendus qui ne sont plus aux normes ou bien tout simplement démodés au point qu’elle ne peut plus les vendre (ou qu’elle doit les brader pour s’en débarrasser), la valeur de ces stocks doit être dévaluée.
Enfin, les opérateurs d’inventaires ne doivent pas hésiter à rajouter sur les listes préétablies des références d'articles qui n’y figurent pas. Cette situation arrive quand des stocks n’ont pas été enregistrés dans les livres, suite à une erreur administrative (facture d'achat mal enregistrée ou transfert de lieu de stockage non saisi dans l'ordinateur).
3. Valorisez votre inventaire physique
Chaque bien physiquement présent dans l’entreprise a soit un coût d’achat, soit un coût de production.
La valeur unitaire des articles en stock peut être établie :
- au coût moyen unitaire pondéré (CMUP) ;
Exemple : selon la méthode du prix moyen (CMUP), une référence d'article est valorisée en euros en faisant la moyenne des prix d'achats constatés pour cette référence.
- selon la méthode du prix du premier entré, premier sorti (PEPS) ;
Exemple : la méthode PEPS consiste à valoriser une référence stockée au prix unitaire d'achat de la pièce la plus ancienne encore disponible en stock.
- selon la méthode du prix du dernier entré, premier sorti (DEPS).
Exemple : la méthode DEPS consiste à valoriser une référence stockée au prix unitaire d'achat de la pièce la plus récemment entrée en en stock.
Déterminez la valeur d'inventaire de chaque référence stockée.
Les règles adoptées par une entreprise pour l'évaluation monétaire de leurs stocks peuvent influer significativement sur la valeur de ceux-ci.
Appliquer la règle du « premier entré, premier sorti » ou au contraire celle du « dernier entré, premier sorti » peut aboutir à une valorisation très différente quant il s'agit de compter des matières ou produits dont le cours est instable.
La fixation des règles d'évaluation relève donc de la stratégie à long terme arrêtée par les propriétaires de l'entreprise.
Important : les règles sont fixées dans les statuts sociaux car la loi comptable impose la permanence dans le temps des méthodes d’évaluation des éléments du bilan comptable. Une modification des principes d’évaluation des stocks est possible, si et seulement si elle est dûment justifiée par l’organe de gestion de l’entreprise (AG des actionnaires). En clair, on ne passe pas de la méthode CMUP à la méthode DEPS ou PEPS d'une année à l'autre sans pouvoir expliquer au fisc le bien fondé de ce changement.
Chiffrez votre inventaire
Une fois la valeur d'inventaire (en euro) de chaque référence connue, vous pouvez déterminer la valeur totale de vos stocks.
Pour valoriser votre inventaire physique, vous allez, pour chaque référence stockée, multiplier le nombre d’unités physiquement en stock par la valeur monétaire de chaque unité. Le recours à un logiciel tableur comme Excel vous aidera ensuite à faire le total de la valeur de vos stocks.
4. Comparez l’inventaire physique et l’inventaire comptable
Dans un monde idéal, les quantités comptées (stock physique) correspondent exactement aux quantités enregistrées sur l’ordinateur (stock théorique). Dans ce cas, vous n’aurez aucune recherche de manquants et il n’y aura pas non plus d’articles entrés en magasin mais non enregistrés informatiquement.
Cependant, dans des conditions d'exploitation réelles, des écarts entre stock physique et stock théorique peuvent se présenter. Il va falloir élucider ces cas, qui sont révélateurs d'erreurs.
Traitez les écarts de quantité
Pour faire apparaître les écarts sur stocks, vous allez positionner côte à côte, pour chaque référence d’article, les quantités recensées dans l’informatique et celles qui ont été comptées.
Les lignes où aucun écart n’apparaît ne posent aucun problème de quantité.
Lorsque, pour un article, le stock compté est inférieur au stock informatique, vous allez diligenter un recomptage et une recherche de manquant. Si le comptage est confirmé, vous chercherez à savoir si une erreur administrative a eu lieu lors de la sortie de stock.
Si, pour un autre article, le stock compté est supérieur au stock physique, vous commencerez par recompter le stock, avant de vérifier, dans les papiers, si une erreur de saisie a pu avoir lieu lors d’une entrée en stock.
Vous mettrez d’autant plus de zèle à expliquer les écarts que la valeur en jeu est élevée.
Si la loi impose un seul inventaire annuel, il est recommandé aux entreprises qui gèrent des stocks importants de procéder à des comptages partiels (on parle d’inventaire tournant) tout au long de l’année afin de pouvoir remédier sans attendre à des anomalies dans la gestion des stocks.
Important : pour interpréter votre inventaire, vous devez pouvoir vous appuyer sur une comptabilité à jour ; celle-ci répertorie, en euros, les entrées et sorties de stocks par le traitement administratif des factures d’achats et de ventes.
Suivez le stock sans informatique
La tenue d’un inventaire permanent (et souvent informatisé) facilite la gestion des stocks. Dans ce système, chaque achat et chaque vente va faire fonctionner un compteur de quantité entrante ou sortante en stock.
L’avantage est que, quand l’informatique est à jour, il est théoriquement possible de rapprocher en permanence le stock informatique des quantités physiquement détenues.
Mais l’inventaire permanent n’est pas obligatoire puisque la loi n'impose la valorisation des stocks qu'une fois par an, sur la base d’un seul inventaire physique.
Les entreprises qui n’ont pas de suivi informatisé des quantités entrantes et sortantes des stocks doivent alors baser leur analyse sur des écarts de valeurs en euros, puisque seul l’enregistrement de données monétaires est obligatoire en comptabilité. En pratique, on recommandera cette pratique simplifiée aux seules entreprises dont la valeur globale des stocks est peu significative.
5. Régularisez la valeur de vos stocks comptables
Vous avez compté et parfois recompté chaque article physiquement. Les jeux sont faits.
Établissez les écritures d’inventaire
Vous allez devoir diminuer la valeur du stock de la valeur des manquants (perte, vol, sinistre) et parfois augmenter la valeur du stock de la valeur des articles physiquement stockés mais pas recensés dans la comptabilité (erreur ou oubli de saisie).
Vous allez peut-être devoir corriger la valeur de certains éléments stockés dont le comptage est parfait mais dont la valeur marchande est dévaluée (produits démodés à brader, articles abîmés, bons à jeter).
Parfois, plus simplement, ce sont les cours des matières stockées qui vont justifier une réévaluation ou une dévalorisation d’un stock. Dans ce cas, la justification de la régularisation est aisée, car les cours des matières sont publiés officiellement.
Exemple : le cuivre, l’or et le blé ont des cours qui dépendent de facteurs internationaux.
Soignez votre justificatif comptable
Au final, l’état d’inventaire est la pièce justificative qui atteste de la pertinence des écritures comptables de régularisation des stocks. Il s'agit de la liste complète des stocks par référence (marchandises, produits, matières) ainsi que leur évaluation en quantité et en euros, ligne par ligne, puis totalisée.
Important : l'état d'inventaire est un justificatif comptable sensible aux yeux du fisc. En effet, il s'agit d'un justificatif établi en interne dont la validité repose sur la compétence et sur la bonne foi des dirigeants de l'entreprise.
6. Mettez-vous à l’abri de la faute de gestion
Les dirigeants sont garants de l’exactitude de l’évaluation du patrimoine de leur entreprise ; il leur revient de mettre en œuvre les moyens suffisant pour permettre une évaluation incontestable des Actifs, dont les stocks font partie.
Deux exemples suffisent pour illustrer la portée de cette responsabilité de gestion :
Exemple 1 : en fin d’année, l’entreprise A a comptabilisé une dévaluation de son stock. Cette baisse de valeur patrimoniale va devoir être constatée dans les charges qui grèvent le résultat (bénéfice ou perte) de l’année. Or, un résultat en baisse, c’est une diminution des ressources de l’entreprise mais aussi une perte de recette fiscale pour l’État.
Exemple 2 : en fin d’année, l’entreprise B a comptabilisé une hausse de la valeur des articles stockés. Cette hausse correspond à l’augmentation du patrimoine détenu par l’entreprise et aussi à l’augmentation de ses ressources, constatée par l’amélioration du résultat comptable de l’année. Si, par hypothèse, la valeur des stocks a été surestimée, l’entreprise est présentée sur papier comme étant plus riche qu’elle ne l’est. Il s’agit d’une tromperie dont, in fine, les dirigeants et/ou les propriétaires de l’entreprise sont responsables.
Lorsque les stocks constituent une partie déterminante de l’Actif de l’entreprise, la participation d’un expert-comptable à la procédure d’inventaire peut être envisagée afin de favoriser le respect des règles d’évaluation en vigueur dans l'entreprise.
Bon à savoir : le dirigeant d'entreprise a qui une faute de gestion est reproché peut être amené à répondre personnellement de ses actes devant le tribunal correctionnel. On parle de « la responsabilité pénale des dirigeants d'entreprise ».
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